Ne pas mettre à disposition de ses salariés les sanitaires et unités mobiles prévues par la loi peut vous coûter cher. Pour preuve, le délibéré du tribunal administratif de Caen rendu le 3 février dernier, qui pourrait faire jurisprudence.

Ce que vous risquez en ne respectant pas la loi sur les sanitaires et unités mobiles

L'affaire remonte au 20 juin 2019 sur un chantier de construction de pavillons sur la commune de Fontenay-le-Marmion (14), au sud de Caen. Au cours de sa visite, et après avoir constaté l'absence de vestiaires, de lavabo et de toilettes, l'inspecteur du travail dresse une amende de 3 750 euros par salarié, soit 11 250 euros pour les trois personnes travaillant sur place. L'entrepreneur, qui met en avant que son entreprise n'est intervenue que deux jours sur le chantier, conteste la décision de la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS), demandant au tribunal administratif de statuer sur cette affaire et d’annuler ces amendes administratives. De son côté, la DREETS détaille les éléments qui ont conduit à cette décision en rappelant que « les employeurs sont tenus d’offrir des toilettes et de quoi au moins se laver les mains sur un chantier, quelle que soit la durée de celui-ci. C’est un besoin élémentaire ». La DREETS indique également ne pas avoir reçu d’éléments financiers de la société. Les professionnels du secteur des sanitaires mobiles alertent leurs clients sur le double risque administratif et financier qu’ils prennent à ne pas installer sur leurs chantiers les éléments d’hygiène (vestiaires, lavabos, toilettes, réfectoire) nécessaires à leur bonne tenue. Pour eux, il est opportun de se référer au "Guide de préconisations de sécurité sanitaire pour la continuité des activités de construction en période d'épidémie de coronavirus Covid-19" publié par l'OPPBTP.

Trois questions à Hervé Montagne, président de la commission Sanitaire Unités Mobiles de DLR

Que vous inspire ce jugement ?

« Pourquoi un travail isolé n’aurait-il pas le droit de disposer d’une installation sanitaire au prétexte qu’il est sur un chantier ? La cabine autonome a sa place sur les chantiers de courte durée, dès le premier travailleur et dès le premier jour. C’est évidemment un facteur d’hygiène, permettant notamment aux travailleurs d’accéder à un point d’eau permettant de se laver les mains. C’est aussi un moyen d’améliorer la productivité, le compagnon disposant d’un sanitaire situé à proximité et lui permettant de se soulager à tout moment de la journée. Aussi, il convient de disposer la cabine WC au plus près du lieu de travail afin que son accès soit rapide. Avec un parc vivant estimé entre 15 000 et 20 000 unités, le parc français est sous-équipé ».

La réglementation est-elle adaptée ?

« Je rappelle que le code du travail date de 1965 et que, dans nos activités, il ne fait aucune distinction entre les bureaux et le chantier. J’ajoute que depuis une dizaine d’années, nous travaillons, avec l’administration pour faire évoluer les choses. La crise sanitaire a incontestablement fait progresser les mentalités. Traditionnellement, les contrôles sur les chantiers sont motivés par des questions de sécurité. Depuis le début de la pandémie, il y a eu une prise de conscience pour les questions d’hygiène. Les enjeux sanitaires en général et le respect des gestes barrière d’autre part, ont mis en exergue la nécessité de pouvoir se laver les mains. Je rappelle que la profession s’est mobilisée dès le début et a défini des mesures exceptionnelles. Ainsi nous continuons à nettoyer les unités mobiles avec des produits virucides, de reconditionner les consommables et de tracer chaque intervention, pour avoir un référentiel « hygiène » rigoureux. De fait, le métier glisse vers la prestation de service, qui structure de plus en plus nos tarifs. On s’éloigne de la simple « location » de cabines autonomes.

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La situation sur le terrain s’améliore-t-elle ?

Depuis deux ans, on observe de réelles améliorations, même si les petits chantiers ou de très courte durées présentent encore des marges de progrès. Trop d’entrepreneurs négligent l’équipement en toilettes au prétexte que les travaux sont de courte durée. De même, avoir accès à un point d’eau afin de se laver les mains, comme le préconisent les recommandations de l’OPPBTP qui sont la référence dans la profession, est non seulement un droit, c’est une obligation légale, sans restriction en terme de durée du chantier. Les solutions sont flexibles et rapides à mettre en œuvre, sans travaux ni raccordement au réseau. En outre, les cabines autonomes ne coûtent pas cher à installer. C’est une vraie bonne solution qui contribue à l’agrément de travail et in fine, à la productivité du chantier ». « La cabine autonome concourt à la productivité sur les chantier ».

Hervé Montagne Président de la commission Sanitaire Unités Mobiles de DLR : "« La cabine autonome concourt à la productivité sur les chantier ».

Jean-Noël Onfield

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