Dans le cadre de son forum, le 24 février à Paris, la Fédération nationale des travaux publics a notamment organisé une conférence à propos des récentes évolutions de la réglementation relative aux déchets de chantier. Des entreprises spécialisées dans ce domaine étaient invitées à présenter leurs prestations.

Des déchets toujours plus contrôlés

À l’image des émissions de gaz à effet de serre, les déchets font l’objet d’une attention croissante de la part des pouvoirs publics. L’État souhaite réduire les gaspillages et les pollutions liées aux activités humaines, sans toutefois porter préjudice à l’économie. Cette volonté de conciliation engendre des lois particulièrement complexes.

À l’occasion de son forum « Investir la transition écologique » qui s’est tenu le 24 janvier à Paris, la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) a jugé bon de consacrer une conférence aux dernières évolutions de la réglementation en la matière. Depuis le début de l’année, le plâtre et les fractions minérales font maintenant partie des fractions à trier. Par ailleurs, les bordereaux de suivi de déchets dangereux sont dématérialisés. Les informations doivent être renseignées sur la plate-forme Trackdéchets dans un délai de sept jours.

Enfin, plus rude pour les travaux publics, les terrassiers doivent tenir un registre interne des terres excavées. Ces volumes doivent également être consignés dans un registre national numérique dans un délai d’un mois après l’extraction. Le site en question est en ligne depuis janvier dernier, « mais il y a une tolérance jusqu’au 30 juin 2022 pour effectuer ses premières déclarations », précise Rosalie Amabile, avocate en droit de l’environnement au sein du cabinet Altes Avocats. « Des interfaces de programmation qui permettront de connecter le registre aux logiciels des entreprises seront bientôt disponibles », ajoute Samuel Coussy, chef de projet sites et sols pollués du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Les contrevenants s’exposent à des amendes forfaitaires de 750 euros et des sanctions pénales pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.

Une marché en essor

Ces derniers textes viennent alourdir un peu plus la tâche des responsables de travaux. À tel point que le recours à un prestataire spécialisé peut se révéler une option intéressante. Dans ce domaine, une nouvelle offre est en train de se structurer. Elle était représentée autour de la table par trois sociétés. Ecodrop est par exemple spécialisé dans la collecte et les dépôts des déchets de gros œuvre et de second œuvre. « Les commandes de collecte peuvent être passées par le biais d’une application mobile, note Marie Combarieu, sa fondatrice. Nous nous chargeons de récupérer le bon de dépôt et de remplir les registres. »

La jeune entreprise Altaroad se propose d’automatiser en partie les contrôles des rebuts sur le chantier. Pour ce faire, elle s’appuie sur une plate-forme web où les utilisateurs peuvent enregistrer les produits sortant du site. Les bordereaux de suivi sont ainsi dématérialisés. Le logiciel est également interfacé avec Trackdéchets. Cet outil informatique peut être complété avec des caméras de lecture automatique des plaques d’immatriculation et des capteurs de pesée dynamique. « Ces derniers fournissent le poids camion avec une erreur de 3 %, explique Cécile Vilette, directrice générale et co-fondatrice d’Altaroad. Avec cette estimation, il est possible d’optimiser la charge des véhicules. »

Quant à la société Odo Smart Systems, elle œuvre dans le champ de la gestion logistique. Sous la marque Odo-vìa, elle commercialise une application de géolocalisation des camions et un système d’instrumentalisation des ponts-bascules. Celui-ci édite un bordereau de pesée numérique avec des clichés du véhicule et des matériaux. Par ailleurs, le logiciel Odo-vìa Logistics peut agréger les données provenant de ces deux dispositifs en vue en conseiller des itinéraires au chauffeur. L’outil informatique fournit aussi au superviseur une vision en temps réel de ses flux de déblais. « L’idée est d’apporter la traçabilité la plus exhaustive possible », indique Willy Lambert, son directeur.

Contrat de cession

Les registres ne sont pas les seules mesures réglementaires susceptibles de créer de l’activité économique. À plus long terme, l’arrêté du 4 juin 2021 sur la sortie du statut de déchet pour les terres excavées et sédiments pourrait provoquer de nouveaux besoins.

Ces matériaux peuvent être utilisés dans le cadre d’un projet de génie civil ou d’aménagement sous certaines conditions, notamment la signature d’un contrat de cession entre le responsable de la préparation des déblais et l’aménageur. « Il faudra donc anticiper leur utilisation, souligne Rosalie Amabile. C’est un point à prendre en considération en aval des travaux. » Pour Céline Blanc, directrice sites et sols pollués de Berengier Depollution et coprésidente du comité économie circulaire de la FNTP, ces réflexions devront impliquer les maîtres d’ouvrages. « Ils devront s’emparer de ces questions et donner des moyens supplémentaires à maîtrise d’œuvre pour réaliser des études. » La gestion de déchets de chantier n’a donc pas fini d’évoluer, d’autant plus que 2023 devrait voir l’arrivée de la responsabilité élargie du producteur.

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