
Une chargeuse sur une plate-forme de recyclage n'est pas exposée aux mêmes risques que sur chantier. A chaque engin, son assurance.
Assurance : prime aux risques
En ces temps où les frais inutiles doivent disparaître, la télématique semble apporter une réponse définitive à la traque des coûts. Quoi de mieux qu’un contrôle en temps réel de toute l’activité du parc ? Mais avant de barder la moindre mini-pelle de capteurs, les autres postes de dépense méritent sans doute un petit audit. L’assurance des machines par exemple ne doit pas être négligée. Terminé les décisions prises par habitude ou sous le coup l’émotion, il s’agit désormais de définir un véritable plan en fonction de ses statistiques de sinistre. « Il y a toujours quelques questions à se poser, observe Claude Noël, directeur du développement construction de groupe de gestion des risques et de courtage WTW en France. Bien calibrer ses assurances bris de machine est un enjeu stratégique. Il existe des solutions adaptées pour chaque type d’engins de chantier. » La démarche peut s’avérer d’autant plus pertinente que les prix grimpent. « Nous constatons une majoration conjoncturelle de 3 ou 4 % par an. Ce contexte est propice à une augmentation de la part d’auto-assurance pour les petits sinistres », constate Sarah Chesneau, chargée de clientèle du cabinet de courtage Théorème. Elle note aussi une certaine méfiance des assureurs qui se montrent plus exigeants quant à la qualité des risques à couvrir. Claude Noël nuance quelque peu ce constat, « le marché reste extrêmement stable. Les risques sont bien identifiés. La concentration d’engins constitue la principale source de sinistre d’intensité, mais les acteurs maîtrisent ce sujet aujourd’hui. »
Sinistres en partage
Dans ce nouvel environnement, le rôle du courtier ne se limite pas à dénicher des polices. Théorème ou WTW évaluent les risques de leurs clients puis les aident à déterminer la part à transférer à des assurances et la part à prendre en interne, appelée aussi la rétention de risques (de l’anglais risk retention). « Dans un contexte de rationalisation des dépenses, l’assurance requiert une approche financière, indique Claude Noël. Au moyen d’une modélisation, il est possible d’estimer un coût total des risques, c’est-à-dire la rétention et les primes des transferts aux assurances. L’analyse de ce dernier doit permettre d’optimiser les budgets d’assurances. » En d’autres termes, un exploitant de parc aura peut-être intérêt à devenir son propre assureur pour un certain nombre de problèmes. Au lieu de verser des primes, il provisionnera de la trésorerie pour couvrir ses réparations. « Dans cette configuration, nous pouvons administrer les fonds de roulement de l’auto-assurance et garantir les prestations de services délivrés par les compagnies d’assurances, précise Sarah Chesneau. Le client conserve ainsi une assistance dans sa gestion des sinistres. » Dans la mise en concurrence des différents assureurs, le courtier jaugera des rapports qualité-prix plutôt que des tarifs. « Il ne faut pas s’arrêter uniquement aux prix. Toutes les caractéristiques des couvertures et de franchises doivent être étudiées, rappel la chargée de clientèle. Des entreprises peuvent être tentées par des compagnies exotiques, mais elles courent le risque d’une défaillance dans le règlement des sinistres ou de se retrouver à chercher un repreneur en cas de faillite de l’assureur. Ces conséquences doivent être prises en compte. »
Offrir plus de souplesse
La généralisation de l’analyse de risques pourrait venir perturber les habitudes des assureurs. Les voilà confronter à des propriétaires de matériels dont le cahier des charges va devenir de plus en plus précis. SMABTP a bien saisi ce besoin croissant de flexibilité. « Les attentes du BTP sont au cœur de notre métier, souligne Didier Gangloff, directeur dommages aux biens de l’entreprise. Nous avons donc fait le choix de revoir notre approche afin d’offrir plus de souplesse à nos clients. » Pour les parcs de moins de 15 unités, le contrat bris de machine peut être individualisé pour chaque matériel. Pour les flottes de plus grande taille, la formule Kantor Parc englobe tous les engins, avec notamment une couverture automatique des nouvelles machines sans déclaration, si leur valeur d’achat est inférieure à 300 000 euros. Didier Gangloff relève quelques particularités importantes de ces polices : les biens restent couverts en cas de réquisition des pouvoirs publics. « C’est une situation assez fréquente. Nous avons préféré le mentionner automatiquement dans nos contrats. » Ces derniers peuvent aussi comporter une clause d’entraide. La machine et ses équipements restent alors couverts en cas de prêt temporaire sur le chantier. Par ailleurs, les pneumatiques et les chenilles, si leur usure ne dépasse pas la moitié, sont aussi garanties. Autre produit taillé pour le BTP, Kantor Location assure les engins loués par l’entreprise. Son tarif est calculé en fonction du montant du budget de location. En matière de vol, SMABTP prend en compte les outils de protection installés, « avec deux bénéfices : une réduction du tarif et une diminution de la franchise en cas. » Parmi les options, le directeur signale la présence du remboursement à neuf pendant 3 ans, « sans déduction de vétusté. C’est une option intéressante de destruction totale. »
Si à quelques clauses près, la plupart des engins se contentent d’un contrat classique, il existe des matériels essentiels à l’activité de l’entreprise. Une assurance complète allant jusqu’à la couverture de pertes d’exploitation peut alors s’avérer essentielle. En dépit de leur caractère hasardeux, ces cas particuliers trouvent tout de même preneur. « Ce terrain de jeu intéresse toujours les acteurs de l’assurance, note Claude Noël. Nous travaillons avec quelques compagnies dans ce domaine. » Dans cette veine, le directeur remarque l’apparition de nouvelles polices complètes destinées aux entreprises travaillant hors du territoire français. Elles comprennent l’assurance du transport de la machine, des garanties internationales et éventuellement la couverture des pertes d’exploitation. Cela dit, au vu des évolutions en cours dans le secteur, les dossiers sortant de l’ordinaire vont se multiplier. SMABTP planche en ce moment sur la question des motorisations électriques et hydrogènes. « Nous avons déjà quelques demandes en ce sens, révèle Didier Gangloff. Nous devrons prendre en compte ces nouvelles technologies. » En attendant que les exploitants ne songent à se prémunir des aléas climatiques ou à acheter des machines autonomes.
L’assurance sans risques : quatre points à garder en tête au moment de négocier sa police
1 - Responsabilité tout terrain
L’assurance de la responsabilité civile des véhicules en circulation (RC circulation) n’est pas seulement obligatoire pour les machines immatriculées, mais pour tous les matériels automoteurs et autoportés en mouvement, qu’ils roulent sur la route ou sur un chantier. Néanmoins, si un engin est aussi considéré comme un outil, les dommages qu’il pourrait provoquer à l’arrêt serait pris en charge par une assurance de la responsabilité civile pour les outils. « Attention, la frontière est mince, prévient Jean-Paul Chauffour, responsable du développement pour les matériels BTP et agricoles du cabinet de courtage Théorème. La déclaration doit être très claire sur cette notion de mouvement. »
2 - Exigez du sur-mesure
Les activités de travaux publics sont variées. Il n’est pas rare qu’un engin se retrouve dans une situation aux limites des cadres définis par sa police. Pour éviter ces zones grises, il vaut mieux éviter les contrats types édités par les assureurs. « Les compagnies ne maîtrisent pas toujours toutes les particularités de la vie d’un matériel, remarque Jean-Paul Chauffour. Nous rédigeons les contrats nous-même et nous négocions des clauses spécifiques aux besoins de l’entreprise. »
3 - Le prix et la valeur
C’est sans doute l’idée essentielle à retenir, la valeur à neuf déclarée détermine les montants versés si le matériel se retrouve hors service. Or, le prix d’achat d’un engin ne doit pas être confondu avec un tarif catalogue. « Chez les loueurs, le prix d’achat peut même être considéré comme un secret professionnel, observe Jean-Paul Chauffour. Dans le cas des engins de chantier, il faut se référer non à la valeur d’acquisition, mais à une valeur de remplacement à neuf au jour du sinistre. Cette dernière est justifiée par une facture pro forma établie par le constructeur. »
4 - Garder n’est pas voler
Autre subtilité du droit, si un tiers loue ou empreinte une machine sans la restituer, il ne commet pas un vol, mais un détournement de bien, « car vous lui avez remis le matériel », précise Jean-Paul Chauffour. Pour couvrir ce type d’actes, votre assurance doit comporter une clause sur le détournement.
Continuez votre lecture en créant votre compte et profitez de 5 articles gratuits
Pour lire tous les articles en illimité, abonnez-vous