Le moratoire annoncé en octobre dernier semble avoir vécu. Depuis le début du mois, les fédérations professionnelles relaient les préoccupations des entreprises quant à une éventuelle suppression du gazole non routier qui déstabiliserait brutalement la filière. Dès le 6 mai dernier, Bruno Cavagné, Président de la Fédération Nationale des Travaux Publics (FNTP), et Jacques Chanut, Président de la Fédération Française du Bâtiment (FFB), ont fait part de leur vive opposition à la suppression du gazole non routier à Bruno Le Maire, effet d’une bombe dans le BTP au cours d’un entretien avec Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des finances.

Loi de finances

En effet, prévue initialement dans le projet de loi de finances pour 2019, cette suppression avait été finalement abandonnée compte tenu des conséquences désastreuses qu’elle aurait entraînées sur les entreprises du secteur. Les présidents de deux fédérations professionnelles ont demandé à Bruno Le Maire de ne pas rééditer, sur la forme et sur le fond, la suppression du GNR envisagée il y a six mois. Ce serait 750 millions euros de hausse de taxe dans le BTP, dont 700 millions pour le seul secteur des TP, soit l’équivalent de la totalité de la marge nette des TP.

Substitution

Une suppression qui serait d’autant plus inacceptable pour les entreprises du BTP, qu’il n’existe pas à ce jour, sur le marché, d’engins de substitution – sinon à l’état embryonnaire – permettant d’éviter une consommation de gazole. Pour les responsables fédéraux, il faudrait à minima une décennie pour accompagner la conversion écologique du secteur en y associant les fabricants d’engins. En outre, les entreprises du BTP n’ont pas toujours les moyens juridiques leur permettant de répercuter une hausse de taxe sur le donneur d’ordre dans le cadre de contrats pluriannuels, souvent à prix ferme sans clause de révision de prix. Bruno Cavagné et Jacques Chanut sont formels : « au moment même où la crise des gilets jaunes montre la nécessité impérieuse de prendre soin de nos territoires, il serait totalement inconséquent de déstabiliser les TPE-PME d’un secteur créateur d’emplois locaux et dont l’activité même participe à la cohésion des territoires et à la transition écologique ».

Artisanat

Auparavant, une délégation de la Confédération nationale des artisans des travaux publics (CNATP), emmenée par sa présidente, Françoise Despret a été reçue à Matignon sur le même sujet. L’instance syndicale a sollicité le cabinet du Premier Ministre pour transmettre ses revendications des artisans des travaux publics et du paysage, sur le gazole non routier (GNR) dans le cadre de la concertation sur la transition écologique du secteur. Le gouvernement étudiant la remise en cause d’un certain nombre de niches fiscales, dont font partie la fiscalité réduite sur le GNR et l’abattement de 10% pour frais professionnels, la CNATP a mis en garde contre les conséquences de ces mesures, notamment sur l’impact économique pour nos entreprises et sur la concurrence déloyale avec d’autres secteurs. Elle a rappelé le principe fondamental d’équité fiscale : mêmes chantiers, même taxes. Elle a également apporté des propositions constructives, en particulier en matière de carburants écologiques. En réponse, le gouvernement s’est engagé à poursuivre les échanges sur l’évolution des mesures fiscales concernant nos activités. Une date a, dans ce but, été fixée pour une troisième rencontre, le 13 juin. J-N.O Photo : La fin du moratoire entrainerait une hausse de 50% du prix du gasoil.