Après une décennie de croissance, le secteur de la construction, à l’échelle mondiale, a atteint le point haut de son cycle. 2018 est donc l’année du tournant, qui laisse augurer un ralentissement à moyen terme. Décryptage. 10 %. C’est le poids du secteur de la construction dans l’activité économique mondiale. Elle est une contribution essentielle à la croissance. Ces données sont extraites du rapport publié par Euler Hermes. Selon le spécialiste mondial de l’assurance-crédit, 2018 sera l’année d’inflexion pour le secteur, dont la croissance mondial du secteur devrait progressivement retomber à 3 % en 2019 après 3,5 % en 2018 et 4 % en 2017. La France n'échappe pas à cette tendance. Dans l'Hexagone, la croissance en volume devrait plafonner à 1,6 % en 2018 et à 1,5 % en 2019 à comparer avec l’augmentation de 2,5 % enregistrée en 2017.
Marchés émergés
Durant les dix dernières années, la majeure partie de la croissance du secteur de la construction à l’échelle mondiale provenait des marchés émergents (+ 57 % de croissance entre 2008 et 2018). Dans le même temps, les pays développés ne sont pas parvenus à retrouver leurs volumes d’avant-crise. Pour 2019, le ralentissement attendu trouvera sa source dans la décélération de la croissance économique mondiale et le resserrement des conditions financières et monétaires. Selon les experts d’Euler Hermes, le secteur de la construction n’a pas été capable de mettre en place les pare-feux nécessaires et de se relever pleinement de la crise de 2008, malgré un contexte économique mondial porteur. La liquidité est historiquement haute. Elle restera donc la préoccupation principale pour le secteur à l’échelle mondiale. Le DSO moyen dans la construction est de 85 jours, ce qui place le secteur parmi les trois plus mauvaises performances en matière de délais de paiement. De plus, la demande n’est que très légèrement repartie dans les plus gros marchés du secteur de la construction (France, Allemagne, Italie et Etats-Unis entre autres), et n’a pas encore retrouvé ses niveaux d’avant-crise. En effet, la croissance moyenne en volume du secteur dans ces pays s’avère négative entre 2008 et aujourd’hui. Enfin, la rentabilité s’est également retrouvée sous pression du fait de la hausse du coût des intrants, et plus particulièrement du coût du travail. Le premier signe de ce virage entamé par le secteur de la construction est la détérioration de la santé financière des entreprises dans plusieurs pays : lors des neuf premiers mois de 2018, le cabinet a comptabilisé 41 défaillances de grandes entreprises (CA supérieur à 50 millions d'euros), soit sept de plus par rapport à 2017. À ce niveau, la construction dépasse la distribution qui enregistre 39 défaillances.L'Hexagone, archétype du phénomène
Rappelons qu’en France, la croissance en volume du secteur de la construction devrait ralentir du fait de difficultés concernant la demande, la rentabilité et la liquidité. Explication : 2018 a été une année difficile pour la construction française en termes de volume, particulièrement pour le secteur résidentiel. Les perspectives 2019 ne sont guère plus optimistes : depuis 2017, les chiffres relatifs aux permis de construire et aux mises en chantier sont décevants. À fin août 2018, le nombre de permis de construire cumulé sur douze mois était en recul de 7,9 % par rapport à l'année précédente. Concernant les mises en chantier, c’est un recul de 10,2 % qui a été constaté sur la même période. Par ailleurs, les marges d’exploitation de la construction française devraient se réduire cette année. En 2018, les entreprises ont été prises entre le marteau et l’enclume, avec d’un côté un recul des revenus et de l’autre une augmentation des coûts, provenant de la hausse du prix des matériaux et des coûts de main-d’œuvre. Enfin, les délais de paiement moyens appliqués continuent d’affecter la liquidité du secteur : ils ont augmenté de sept jours entre 2016 et 2017, et s’élèvent désormais à 75 jours. J-N.O