
Les investissements chez Soletanche Bachy sont alloués exclusivement aux pelles à câbles, sur ces critères de renouvellement d’un parc qui doit afficher un taux d’engagement optimisé.
Pelles à câbles : sur étagère ou sur mesure ?
Pelles à câbles ou grue à flèche treillis sur chenilles ? Chez Soletanche Bachy, la terminologie reste conditionnée par l’application. Une pelle est câble est destinée à recevoir un outil, quand la grue à flèche à treillis est dédiée à la manutention. Dans les deux cas, ces matériels sont incontournables dans les fondations spéciales, la configuration du chantier et la nature des travaux conditionnant le choix des types de machines mises en œuvre. « Nous possédons toutes nos pelles à câbles, qui sont considérés comme de matériels de production, et recourons aux prestataires spécialisés pour les opérations de levage et de manutention, en particulier dès que les capacités dépassent 100 t, explique Olivier Terrier, directeur matériel chez Soletanche Bachy. Dans ce cas, la définition du besoin est exprimée par le chantier qui sélectionne le matériel le plus adapté. » Concevant et fabriquant ses propres matériels, l’entreprise s’appuie sur son retour d’expérience pour faire évoluer son cahier des charges vis-à-vis de ses prestataires. La sécurité étant la principale préoccupation de l’exploitant, une attention particulière est portée au choix des crochets, à la présence de caméra et aux procédures de mise en œuvre. « Nous avons des exigences particulières dans le domaine de l’accès à la machine et notamment à la cabine, souligne Olivier Terrier. Monter dans la cabine ou accéder à la tourelle d’une machine sur un porte-char est quasiment impossible si l’on veut que l’opérateur soit en sécurité. » Avec seize grues à flèche treillis, sur un parc d’une soixantaine de grues et foreuses de « production ».
Botte Fondations couvre ses besoins opérationnels en forage. Pour les opérations de manutention, l’entreprise fait généralement appel à des prestataires spécialisés. Si le parc, que se partagent Bauer et Liebherr, a été renforcé par deux machines supplémentaires, en prévision des travaux du Grand Paris Express, il reste globalement stable. L’exploitant investit régulièrement dans son renouvellement pour prévenir le vieillissement de son outil de production et ne pas s’exposer à des coûts de maintenance trop élevés, le suivi technique étant réalisé en interne. « Avec l’apparition des cutters de forage hydrauliques, les capacités des matériels évoluent, rapporte Jean-Yves Baron, responsable matériel chez Botte Fondations, filiale de Vinci Construction France. Les capacités des bennes augmentant pour des parois moulées étant de plus en plus épaisses et profondes, les porteurs doivent pouvoir intégrer des équipements, tels que des treuils à chute libre de plus en plus performants. » Eiffage dispose de son propre parc pour son activité Fondations, en appui à celui de son partenaire italien Icope qui intervient en cotraitance. L’entreprise a beaucoup investi, notamment en porteurs pour hydrofraises, pour faire face aux volumes de travaux de parois moulées profondes liées au plus grand chantier d’infrastructure en Europe. La difficulté actuelle réside donc dans la capacité de l’exploitant à trouver des relais d’activité post-Grand Paris. La gestion technique du parc de grues à flèche treillis Hitachi, Kobelco, Liebherr et Sennebogen, est assurée par Eiffage Génie Civil, confirmant le caractère spécifique de cette activité. Leur exploitation s’inscrit dans le cadre d’un suivi d’activité et un carnet d’entretien détaillé. Une attention particulière est portée aux pannes, en particulier, les plus récurrentes, préfigurant une maintenance préventive du parc. Pour Jean-Marie Dolo, directeur technique à la direction des supports opérationnels de la branche infrastructure d’Eiffage, « l’acquisition des matériels est conditionnée par la capacité d’intégration de l’hydrofraise sur la grue à flèche treillis. » L’enjeu est de limiter l’adaptation du porteur à l’outil pour tendre vers la meilleure intégration des deux. Le critère financier entre également en considération. La consommation de gasoil est prise en compte chez Eiffage Fondations, qui, conformément à la feuille de route dans le domaine de la réduction de l’empreinte carbone du Groupe, s’intéresse aux motorisations alternatives. « Force est de reconnaître dans les plages de puissances concernées, soit au-delà de 300 kW, que l’offre alternative au diesel n’existe pas actuellement, commente Jean-Marie Dolo. Le recours à des solutions électrique ou à l’hydrogène est conditionné par les infrastructures d’accès à ces énergies. »
« Sur mesure »
Spie batignolles fondations possède une vingtaine de pelles à câble en parc. Le recours à la location n’intervient que très ponctuellement, principalement pour des problématiques de charge de travail. Après être montée en puissance dès 2014 pour répondre aux besoins des chantiers du Grand Paris Express, moyennant le triplement de ses investissements, l’entreprise ajuste à présent sa flotte. Les acquisitions de pelles à câbles sont ramenées à quelques unités depuis 3 ans. Pour les opérations de manutention sur site, la gestion des moyens matériels est différente. L’approche consiste à acquérir les moyens de 50 t jusqu’à 150 t de capacité chez Sumitomo ou Sennebogen pour les flèches télescopiques, en recourant là aussi à la location pour écrêter les pics d’activité. Les matériels de forte capacité (jusqu’à 250 voire au-delà) sont apportés par des prestataires externes. « Nous avons choisi de ne pas investir dans ce type de matériel, préférant allouer nos ressources au développement d’équipement sur notre cœur de métier, explique Richard Lohier, directeur matériel chez Spie batignolles fondations. Au-delà des contraintes budgétaires, les possibilités offertes par le marché répondent à nos besoins tout en nous apportant la fiabilité, la flexibilité et la facilité de mise en œuvre que nous recherchons avec la location. » Ayant développé en interne un cutter de très forte puissance pour répondre avec des variantes aux appels d’offre, Spie batignolles fondations a interrogé les principaux fabricants de pelles à câbles à même de recevoir l’outil. « Nous veillons à pérenniser la relation avec notre fournisseur historique Liebherr, tout en interrogeant d’autres marques, commente Richard Lohier. La qualité technique des machines est évaluée, mais la différence se fait aussi au niveau du service et de la capacité à nous accompagner dans des configurations de machines personnalisées. » Sur ces critères, le choix s’est porté sur le porteur HD 6140 HD de chez Sennebogen, « largement modifié » conformément au cahier des charges de l’exploitant en matière de puissance et de capacité, le cutter 3XL étant destiné aux parois moulées de forte épaisseur (jusqu’à 1,8 m) et à grande profondeur (au-delà de 80 m). « Les performances opérationnelles avec notre cutter ont été validées. La marque étant très implantée dans la manutention industrielle et portuaire, le niveau de service se rapproche de celui fourni par Liebherr qui assure 95 % de la maintenance technique de nos pelles à câbles. » Avec, en moyenne 1 200 heures travaillées par an sur les quatre premières années, le taux de disponibilité constitue un enjeu fort. Seul bémol, la valeur de revente, le caractère spécifique de ces pelles à câbles et de leurs outils générant un écart significatif avec le prix d’acquisition. Comme le relève Richard Lohier, « la notoriété de Liebherr dans le domaine des fondations spéciales facilite la revente des pelles à câbles avec une valeur de marché reconnue. »
« O » émission locale
« Nous veillons à ne pas dépendre d’un fournisseur, nos achats étant conditionnés par des enjeux de sécurité, d’empreinte carbone, de performances techniques, révèle Olivier Terrier. Nous observons une certaine harmonisation du niveau de sécurité proposé par les principaux fournisseurs européens. » La situation est plus hétérogène en matière de consommation. À l’usage, des écarts « significatifs », sont observés selon les technologies des moteurs choisis. Aussi, la fin de la fiscalité avantageuse du GNR est attendue avec beaucoup d’appréhension. Le poste carburant étant l’un des plus sensibles, l’exploitant suit avec attention les alternatives proposées par les fournisseurs, notamment les versions électriques sur batteries. Les capacités de rechargement devront être compatibles avec les puissances nécessaires à l’exécution des différents travaux de fondations spéciales. Comme le relève Olivier Terrier, « le volume de batteries pour fournir suffisamment de puissance nécessaire pour le fraisage d’un panneau ou l’excavation au cutter sur 70 m de profondeur n’est pas viable d’un point de vue économique. C’est pour cela que nous avons développé des Hydrofraises électriques en équipant nos porteurs traditionnels d’un power pack électrique (alimenté par le secteur) qui assure toute la partie forage de la paroi moulée. Avec en bonus, une diminution très importante des nuisances sonores. »
Si les matériels ne devraient pas évoluer significativement en matière de capacité, des changements majeurs sont attendus dans le domaine de la motorisation. La solution électrique semble la plus accessible, même si elle pose les questions de l’alimentation sur le chantier, de l’autonomie et de la recharge. Elle se pose avec d’autant plus d’insistance que les besoins sont élevés et que les infrastructures d’alimentation n’existent pas encore. Acheter un moteur diesel qui sera de moins en moins côté ou faire le pari de l’électricité en sachant que le déploiement de ces solutions n’est pas possible en l’état actuel des choses, tel est le dilemme auquel est confronté l’exploitant, aujourd’hui. Pour les motorisations électriques, il faut intégrer la gestion des batteries et tendre vers un équilibre entre les cycles de travail et de charge sans compromettre le rendement du chantier. Comme pour le gaz ou l’hydrogène, c’est la capacité des filières à mettre en œuvre la logistique qui conditionnera le choix de l’énergie de nos futurs matériels. En tout état de cause, l’entreprise ne pourra avancer plus vite que les fournisseurs de matériel. Ces derniers ont tout intérêt à accélérer le développement de ces alternatives pour que leurs clients se positionnent et disposent ainsi d’un avantage concurrentiel. « Liebherr est en avance sur ces concurrents, relève Richard Lohier. Les enjeux environnementaux et de RSE devenant prégnants, l’efficacité énergétique va devenir centrale dans nos négociations avec nos fournisseurs. »
Après avoir mis en œuvre pour la première fois en France une foreuse électrique de pieux commercialisée par Liebherr, Botte Fondations souhaiterait poursuivre ses investissements dans des grues à flèche treillis intégrant la même technologie. Quelques adaptations seront nécessaires, compte tenu du mode de travail de ces matériels. À ce titre, des systèmes de récupération d’énergie cinétique lors de la descente du treuil en chute libre ou d’accumulateurs hydrauliques doivent être finalisés. Comme le souligne Jean-Yves Baron, « l’entreprise n’est pas incitée par ses donneurs d’ordre pour mettre en œuvre des motorisations alternatives. Nous sommes force de proposition pour développer ces innovations, les innovations électriques à court terme, électriques et, à plus longue échéance, avec vraisemblablement à l’hydrogène et vraisemblablement l’hydrogène à plus longue échéance. En attendant, le diesel, les motorisations diesel, dont les nouvelles générations affichent des niveaux d’émission drastiquement beaucoup plus bas et avec une efficacité énergétique nettement améliorée restent la norme. » À ce titre, les systèmes de gestion du moteur les systèmes de gestion moteur en fonction de l’application sont déterminants dans la maîtrise de la consommation. Le principal levier de progrès réside, pour Jean-Marie Dolo, dans la digitalisation des matériels, avec un accès à des informations en temps réel et de plus en plus précises des matériels. De quoi éclairer les décisions de l’exploitant à partir de données objectivées et tendre vers une assistance à la conduite des machines.
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