Créée en 2020, l'association Les SouterReines cherche à promouvoir un secteur du BTP ouverts à tous, y compris aux femmes. Myriam Foutaine Boulle, sa présidente, revient sur la genèse et les projets de ce nouvel organisme.

« Il faut démystifier l’image des Travaux Publics »,une interview de Myriam Fontaine Boulle, Présidente des SouterReines

Qu’est ce qui a prévalu à cette prise d’initiative ?

L’élément déclencheur remonte à septembre 2018, à l’occasion du salon « Espace Collectivités » et d’un constat que j’ai partagé avec deux femmes de l'entreprise Capocci. En regardant notre entourage, nous avons réalisé que nous faisions partie des quelques femmes présentes sur le salon alors que beaucoup d’entreprises de construction étaient présentes. L’idée est venue de prendre une initiative pour qu’il y ait plus de femmes dans cette profession, au sein de laquelle on peut s’épanouir, quelles que soient les responsabilités qui nous sont confiées. Nous étions d’autant plus sensibilisés à la question que les chantiers du Grand Paris démarraient et que nous savions pertinemment que, pour faire face à un tel volume de travaux dans une même temporalité, les besoins de main d’œuvre seraient gigantesques.

Que représentent les effectifs féminins dans la profession ?

D’une manière globale, cela oscille entre 12 et 18% des emplois dans le secteur du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP). C’est évidemment très fluctuant d’une filière à l’autre. Schématiquement, la féminisation est plus poussée dans l’ingénierie que dans l’exécution

Entre ce constat et l’association telle qu’elle existe aujourd’hui, qu’est ce qui a changé ?

La structure a évolué à mesure que l’objectif grandissait ! A l’origine, nous n’avions pas du tout l’idée de créer une association. Au départ, nous ne voulions que réunir des femmes de la profession qui s’épanouissent dans leur métier et qui, au quotidien, démontrent que les métiers du TP sont accessibles à tous. Nous avions donc convenu de nous retrouver tous les deux mois autour d’un déjeuner et ainsi de créer un petit réseau entre femmes. Au début de l’année 2019, nous avons considéré qu’il serait bon de donner un cadre à cette action. Après avoir créé un collectif, nous nous sommes aperçues que le statut association était plus simple et mieux adapté. Ce changement a été acté lors de l’assemblée générale constituante en octobre 2019. A cette occasion, nous avons créé un évènement, sur un des chantiers de la ligne 16 de la Société du Grand Paris. Le temps de finaliser les formalités administratives, l’association est née officiellement en janvier 2020.

Quels sont vos objectifs ?

Il faut démystifier l’image du BTP. Les SouterReines veulent développer la mixité dans ce secteur et entendent participer à la promotion des métiers de toute la filière « Construction », au féminin. Nous nous appuyons sur un réseau professionnel solidaire et bienveillant, dans le but de bâtir collectivement des avancées dans la profession. Cela suppose de participer à la levée des freins à l’embauche des femmes et à l’évolution des mentalités concernant la place des femmes dans le secteur du BTP. Pour cela, nous voulons aider les entreprises, quelle que soit leur taille, à féminiser leurs équipes. Nous voulons pouvoir proposer, notamment, des formations pour les femmes qui souhaiteraient accéder à des postes d’encadrement et qui voudraient être accompagnées dans leur démarche et organiser des tables rondes sur les différents thèmes autour de la mixité.Les remontées du terrain montrent que les femmes ne rencontrent pas de difficultés majeures sur le chantier. La mécanisation des opérations rend la plupart des métiers accessibles aux femmes. L’un de nos défis tend à pouvoir mieux communiquer sur la réalité du travail sur un chantier et sur toutes les techniques et technologies qui sont mises en œuvre dans l'exécution des tâches pour les rendre moins pénibles. Cela contribuerait à redorer le blason de la profession et profiterait à tous les acteurs de la filière.

La pénibilité associée à ces métiers est-elle le premier frein identifié, ?

A ce stade, la majorité de nos adhérents exercent des fonctions dans l’encadrement. La notion de pénibilité n’est pas problématique. Nous ne disposons pas de vision suffisamment exhaustive du problème sur des postes plus opérationnels. Il serait évidemment très intéressant d’avoir le ressenti des femmes sur ces postes “de terrain”. Personnellement, je crois que le premier frein est lié à un manque de connaissance du secteur. Les métiers du BTP en général, sont peu ou mal connus. Toute la filière souffre d’un déficit d’image de marque. Les métiers du BTP ne sont pas suffisamment valorisés dans les établissements scolaires par exemple, en particulier dans les classes où les orientations des jeunes se jouent. Trop souvent, c’est un choix par défaut.

Existe-t-il selon vous, des postes qui restant inaccessibles aux femmes ?

Les remontées du terrain montrent que les femmes ne rencontrent pas de difficultés majeures sur le chantier. La mécanisation des opérations rend la plupart des métiers accessibles aux femmes. L’un de nos défis tend à pouvoir mieux communiquer sur la réalité du travail sur un chantier et sur toutes les techniques et technologies qui sont mises en œuvre dans l'exécution des tâches pour les rendre moins pénibles. Cela contribuerait à redorer le blason de la profession et profiterait à tous les acteurs de la filière.

Des cimportements sexistes sont-ils constatés ?

Il faut être clair : oui, il y encore des comportements et plus encore des réflexions qui n’ont pas lieu d’être. Au-delà des préjugés sur les femmes et de leurs compétences professionnelles, le plus important, de mon point de vue, c’est qu'ils concernent majoritairement les jeunes qui arrivent dans la profession. Une fois que la personne a fait ses preuves, la question ne se pose plus et il n’y a plus de distinction dans les équipes. Je peux citer le cas d’une conductrice de tunnelier et d’une grutière qui adorent leur métier, se réalisent pleinement et sont totalement épanouies dans leur vie professionnelle. Sur les postes d'encadrement en général, les mentalités ont beaucoup évolué et les comportements sexistes se font de plus en plus rares. La question du comportement renvoie aussi aux préjugés que véhiculent ces métiers.

Il faut être clair : oui, il y a encore des comportements et plus encore des réflexions qui n’ont pas lieu d’être. Au-delà des préjugés sur les femmes et leurs compétences professionnelles, le plus important, de mon point de vue, c’est qu’ils concernent majoritairement les jeunes qui arrivent dans la profession. Une fois que la personne a fait ses preuves, la question ne se pose plus et il n’y a plus de distinction dans les équipes. Je peux citer le cas d’une conductrice de tunnelier et d’une grutière qui adorent leur métier, se réalisent pleinement et sont totalement épanouies dans leur vie professionnelle. Sur les postes d'encadrement en général, il y a moins de problèmes. La question du comportement renvoie aussi aux préjugés que véhiculent ces métiers.

L"égalité homme-femme est-elle respectée dans le domaine des rémunérations ?

Nous n’avons pas d’éléments d’appréciation sur la question. Ce ne sont pas des questions que l’on aborde au sein de l’association pour le moment En tout cas si on regarde les chiffres publiés en mars dernier par le Ministère du travail, l’index moyen des entreprises de la construction qui ont publié leurs chiffres est de 80 sur 100 alors que la moyenne nationale tous secteurs confondus est de 86. L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes est l’un des indicateurs de l’index sur l’égalité professionnelle (40 sur 100).

Au-delà de la place des femmes dans la filière, pourquoi avoir choisi de défendre la mixité ?

Cela fait partie des leviers sur lesquels il faut agir si l’on veut améliorer l’image de marque de la profession et renforcer son attractivité. Le sujet est plus global que la seule question de la place des femmes dans le BTP : c'est mettre en valeur les métiers manuels, leur redonner l’importance qu’ils méritent et remettre à bon niveau toute la filière de l’enseignement des travaux manuels, qui, dans notre pays, ont toujours été dévalorisés alors que ces métiers sont juste vitaux pour la société. Sans cette mobilisation générale, la pénurie des compétences va s’accentuer encore davantage. On ne rattrapera pas 30 ans d’inaction dans le domaine de la formation et de l’orientation sans une prise de conscience collective. Pour cela, nous aimerions pouvoir collecter des témoignages en provenance de différentes régions du monde afin de montrer comment le BTP est perçu dans d’autres pays et quelle est la place des femmes dans ces différents pays.

Quelle est votre feuille de route cette année ?

Notre priorité concerne les jeunes dans les collèges. Au travers de l’opération « Objectif 100 », nous allons nous adresser directement à eux, en particulier ceux des classes de 3e en leur proposant de réaliser leur stage d’une semaine dans une entreprise du secteur, afin de découvrir la profession au travers d’un chantier ou d’un projet. Nous sollicitons donc les entreprises afin qu’elles nous permettent d’accueillir le plus de jeunes. Nous nous sommes fixés comme objectif de décrocher une centaine de stages en Ile de France dans un premier temps. Nous ambitionnons aussi de pouvoir recruter le premier permanent de l’association. Cela suppose de pouvoir bénéficier de plus de soutien de la part de notre écosystème avec qui nous partageons la même volonté de faire découvrir le monde des infrastructures et de la construction au plus grand nombre, et en particulier aux femmes qui représentent 60¨% de nos adhérents.

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