
Congrès DLR : rassembler aujourd'hui pour peser demain
Après deux ans d’absence, le congrès DLR* était de retour. L’un des principales événements du secteur des matériels de chantier s’est tenu à Nantes le 31 mars et le 1er avril. La Fédération avait choisi de construire sa série de conférence autour du thème « hier, aujourd’hui, demain ».
Les représentants de l’organisation professionnelle ont respecté ce credo avec une intervention entre bilan et perspectives. « DLR a pas mal changé ces dernières années, remarque Hervé Rebollo, délégué général de l’association. Nous essayons de créer un grand ensemble des matériels. »
Partenariats et commissions
Au cours de la dernière décennie, la structure a regroupé sous sa bannière plusieurs entités liées à l’industrie des équipements de construction. Elle accueille aujourd’hui deux membres partenaires, l’Acim (Association des constructions industrialisées et modulaires) et l’UFL (Union française du levage). D’autres syndicats se sont dissous pour rejoindre ses commissions techniques, le SNPSM (syndicat national des professionnels du sanitaire mobile) et en début d’année le SPMDG (Syndicat professionnels des monteurs et dépanneurs de grues). La Fédération compte désormais un millier de membres, qui emploient entre 50 000 et 60 000 salariés.
En parallèle de cette politique de rassemblement, l’organisation cherche à élargir ses services, « dans le numérique notamment, indique Philippe Cohet, président de DLR. Nous réfléchissons à une plate-forme de dématérialisation des factures. Nous allons également nous rapprocher des régions. »
Un système à bâtir
Au vu du demain esquissés par les différents conférenciers, ces mesures de renforcement semblent plus que nécessaires. Entre autres exposés, Bruno Lapeyrie, directeur du Centre d’excellence transition énergétique de Keolis, est venu détailler ses observations quant à l’usage des bus à batterie. « Un véhicule électrique sans le système qui l’accompagne n’existe pas », rappelle-t-il en introduction. Si la maxime vaut pour tous les engins, le pétrole possède un siècle d’avance sur l’électricité. L'utilisateur ne prête plus attention à son système, sauf quand une crise provoque un regain d'intérêt. En revanche, tout reste à construire chez les électrons.
Dans le domaine des bus, cette nouveauté induit une augmentation du coût total de possession (TSO) compris entre 25 et 30 %. Les dépenses d’investissement (capex) représentent 2/3 de ce montant. Pour un modèle au Diesel, elles constituent seulement la moitié. « Plus un véhicule électrique roule, moins il revient cher, note Bruno Lapeyrie. Toutes les solutions de financement qui limite l’endettement de l’entreprise sont les bienvenues. »
Variations d'émissions
Le directeur a également souligné quelques idées essentielles. Un engin à batterie émettra toujours moins de CO2 que son équivalent thermique durant sa phase d’utilisation mais aussi durant l’ensemble de son cycle de vie. Pour autant, la quantité d’émissions d’une machine électrique dépend beaucoup de l’origine du courant. Ainsi, le fonctionnement d’une pelle à batterie n’aura pas les mêmes conséquences en France (un mix composé notamment de 69 % de nucléaire et de 24 % d’énergies renouvelables en 2021) ou en Allemagne (un mix reposant sur 43,8 % d’énergies fossiles et 40,5 % d’énergies renouvelables en 2021).
Par ailleurs, environ 95 % des cellules qui composent les batteries sont produites en Asie. Changer de carburant ne supprimera pas notre dépendance aux exportations. Enfin, la volatilité des prix des énergies complique un peu plus le pilotage de ce changement. La solution viendra peut-être d’une nouvelle technologie de batterie, « les procédés évoluent peu aujourd’hui », tempère Bruno Lapeyrie. L’allégement des bus s’avère une piste plus prometteuse, « concevoir des véhicules spécialement dans cette optique entraîne une baisse extrêmement sensible du TSO. »
Des constructeurs automobiles déphasés
Autre allocution, Bernard Jullien, maître de conférences en économie à l’université de Bordeaux et directeur du Gerpisa**, a dressé un panorama de la distribution dans le secteur de l’automobile. Certes, les volumes et la clientèle ne sont pas comparables avec le monde de la construction, mais certaines dynamiques pourraient aider les concessionnaires de matériels dans leur approche du marché.
Bernard Jullien met en évidence les difficultés de vendre du neuf. « Les marges sont ridicules. Ce sont la vente de pièces de rechange et le garage qui couvent les frais. » L’année passée, 1,659 million de véhicules neuf ont été mis en circulation alors que 6 millions de véhicules d’occasion changeaient de propriétaire. « L’âge moyen d’un acheteur de voiture neuve est de 58 ans. Les constructeurs sont déphasés par rapport au marché. »
Dans le même temps, le commerce traditionnel des pièces d’usure tend à disparaître. Elles durent autant que la voiture, ou tout du moins jusqu’à sa revente. « Ce sont les petits garages qui prospèrent, ceux capables de s’occuper des vieilles bagnoles », relève Bernard Jullien. La profession des mécaniciens et réparateurs automobiles est bien organisée. Ils ont réussi en 2002 à obtenir de Bruxelles l’autorisation de commercialiser des produits équivalents aux composants fournits par les constructeurs automobiles. Les pièces détachées visibles demeurent la dernière chasse gardée des fabricants. « Elle devrait bientôt sauter », prévient le maître de conférences.
Des concessionnaires indispensables
Quant à la disparition de la distribution au profit de la vente directe par Internet, il n’y croit pas. « Cette méthode donne des résultats dans un contexte très particulier : pas de stock et du chômage partiel. En temps normal, si on attend un client sur Internet, il ne vient pas. Sans chômage partiel et avec un stock à écouler, il arrivera un moment où il faut brader. Pour brader bien, il faut des commerçants. Le système de la concession a de beaux jours devant lui. Aucun constructeur d’envergure n’a jamais porté seul son stock. »
Il s’agit de garder en tête cette interdépendance au moment de négocier une carte. Les distributeurs ont tout intérêt à adopter des positions communes dans ce type de pourparlers, sous peine que la profession ne se retrouve en position de faiblesse face aux constructeurs.
Cependant, Hervé Rebollo déplore un manque d’investissement des membres de DLR. « J’ai de la chance d’avoir un conseil de direction qui délègue beaucoup et des collaborateurs en or, mais vous êtes de plus en plus consommateurs et de moins en moins présents. Vous êtes absents de votre fédération, lance-t-il aux congressistes. Même quand les choses fonctionnent, c’est toujours les mêmes qui participent. Venez dans les commissions, proposer à vos voisins d’adhérer. Nous comptons présenter un plan de la filière à l’État. Il va y avoir du boulot. »
* : La Fédération nationale des distributeurs, loueurs et réparateurs de matériels de construction et de manutention
** : Groupe d’étude et de recherche permanent sur l’industrie et les salariés de l’automobile
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