Reconnaître le rôle clé des adhérents d’Evolis pour l’industrie française et de créer de nouveaux modèles coopératifs au seins des filières pour renouer avec les grands plans industriels et accélérer la transition écologique.. Montabert
Reconnaître le rôle clé des adhérents d’Evolis pour l’industrie française et de créer de nouveaux modèles coopératifs au seins des filières pour renouer avec les grands plans industriels et accélérer la transition écologique..
Gagner en notoriété et être mieux identifié par les pouvoirs publics : c’est l’objectif d’Evolis* face aux enjeux des transitions sociale, environnementale et sociétale.

Le défi est de taille pour les 600 adhérents de la fédération professionnelle des fabricants de biens d’équipements et de solutions industrielles, qui contribuent activement à la compétitivité et à l’efficacité de l’économie française dans son ensemble, et en particulier dans les secteurs de la construction et des infrastructures. Dans un contexte de concurrence internationale, ces PME/TPE, qui réalisent la majorité de leur chiffre d’affaires à l’export (à hauteur de 56% pour un chiffre d’affaires global de 19 Mds €), doivent apprendre à travailler ensemble. Comme le relève Jean-Claude Fayat, président d’Evolis, « il n’y a pas de grands groupes dans notre fédération mais il y a de très belles entreprises innovantes, souvent leader dans leur domaine, qui collaborent largement à l’efficacité et à la compétitivité de l’industrie française. C’est un secteur d’excellence, trop caché, qui contribue à faire vivre des secteurs d’excellence dont le BTP, le ferroviaire, l’aéronautique ou l’automobile. Beaucoup de nos adhérents sont des entreprises patrimoniales, avec des dirigeants engagés, qui jouent un rôle majeur dans la chaîne de valeur de l’industrie ».

Circularité

Parmi les principales difficultés auxquelles ces entreprises, apporteuses de solutions pour la décarbonation ou la gestion de la data, sont confrontées, les tiraillements entre les différents enjeux économiques, législatifs et environnementaux. En outre, elles sont souvent en avance de phase vis-à-vis des donneurs d’ordre, qu’il s’agisse de l’économie circulaire, du recyclage ou de reconditionnement. À ce titre, Montabert (CA : 140 millions €, 470 collaborateurs), filiale du groupe Komatsu, est représentatif des défis à relever pour concilier pérennité, compétitivité et attractivité en développant l’économie circulaire. Fondé en 1921, le spécialiste des équipements hydrauliques de démolition et de forage pour les TP, les mines et les carrières, exporte 95% de sa production de BRH et autres perforateurs. Des produits qui eux-mêmes servent à l’extraction des matières premières comme le fer, le cuivre, le nickel ou le lithium ; nécessaires à la transformation électrique de la filière. Sur son site industriel de Saint-Priest (69), il traite chaque année plus de 5 000 t d’acier. Son ancrage territorial est fort, plus de 60% des achats « matière » et de sous-traitance étant réalisés en France. Identifié à l’industrie mécanique, Montabert doit combattre les préjugés associés à une activité « vieillotte », en valorisant la dimension innovante de la société et en capitalisant sur l’expertise acquise. Les enjeux de compétitivité sont prégnants, l’industriel étant confronté au quotidien et sur tous ses marchés à des concurrents fabricants dans des pays la matière première, la main-d’œuvre, mais aussi l’énergie sont moins chères qu’en France et où les niveaux de taxation et de réglementation sont aussi inférieurs. « Se démarquer et rester compétitif passe par deux critères d’innovation et de qualité de performance, estime Christine Champoiral, directrice générale de Montabert. L’enjeu est d’assurer la pérennité de notre entreprise, maintenir l’emploi et rester profitable pour pouvoir continuer à investir et satisfaire notre actionnaire ». Dans le contexte de la transition environnementale et d’exigence de décarbonation, les questions de sobriété et de responsabilité sociétale engagent l’industriel qui n’a pas attendu l’évolution de la réglementation pour promouvoir l’économie circulaire en proposant le rachat de ses équipements à ses clients. « Il nous arrive de reconditionner en usine jusqu’à 3 fois le même équipement, assure Christine Champoiral, Ces produits sont proposés avec la même garantie qu’un outil neuf ». Dans le cadre de l’industrialisation du concept d’économie circulaire, la dirigeante doit surmonter des défis majeurs, dont celui de la logistique inversée, les matériels étant exploités dans le monde entier, souvent loin des bases lyonnaises. Il convient donc de pouvoir les reconditionner au plus près de l’endroit où ils sont utilisés. Un autre défi d’ordre technologique a trait au produit lui-même. S’agissant d’une industrie de précision, certains composants doivent être rectifiés avec une précision de l’ordre du micron. Une tolérance nécessaire pour pouvoir assurer le même niveau de performance et de qualité à l’issue de sa remise en état. Régénérer un outil avec ce niveau d’exigence constitue aussi un réel tour de force. Les équipes R&D sont donc constamment challengées, afin qu’elles fassent évoluer le design du produit pour éco-concevoir les nouveaux modèles et en améliorer la réparabilité. Mais le vrai défi est d’ordre économique. Fort d’une réelle expertise dans ce domaine et malgré les efforts de promotion, le reconditionnement ne représente que 2% du CA du fabricant. « En dehors de période pénurique, les grands donneurs d’ordre vont privilégier un CAPEX et préférer flécher leurs investissements vers du neuf, constate Christine Champoiral. Ou alors, ils vont préférer un écart de prix considérable pour pouvoir accepter un outil reconditionné ». Dans le cas précis de Montabert, si les coûts technologiques, logistiques sont bien réels, ce n’est pas réellement la part matière qui impacte le prix de revient d’un BRH ou d’un perforateur, mais bien la valeur ajoutée contenue. Par définition, cette dernière dépend de la qualification de la main-d’œuvre locale et de son savoir-faire qu’il faut valoriser à la fois sur le plan économique mais aussi par rapport aux enjeux de la transition écologique. Cette proposition de valeur doit donc être appréciée par le prisme de l’économie de la fonctionnalité, qui permettrait d’offrir des heures percussion avec un BRH reconditionné, moins impactant sur l’environnement, plutôt que de vendre un outil neuf.

Modèle d’affaires

Deux autres adhérents, représentant les autres secteurs d’intervention d’Evolis, illustrent parfaitement ce constat. C’est le cas de Marposs, fournisseur de premier plan de l’industrie automobile et leader mondial en solutions de mesure, inspections et tests pour les applications de moteurs à combustion interne et les véhicules électriques. Cette PME, qui exporte 94% de sa production dans plus de 30 pays, consacre 10% de son CA en R&D. À l’origine de la création d’un consortium de constructeurs pour développer une offre « européenne », ce fervent militant du travail collaboratif dans toute la filière, entend sécuriser et renforcer l’activité des industriels pour aider les fabricants français à rester compétitifs en passant par la normalisation. Sur le marché de l’eau, Claire, plaide pour instaurer une collaboration entre l’État, les collectivités et les acteurs industriels dans le but de dépasser les enjeux transactionnels et prendre en compte les enjeux du patrimoine collectif. Ce dernier est constitué d’un million de kilomètres de canalisations, dont 20% dits « fuyards », qui font que chaque année, 1 milliard de m3 d’eau potable sont perdus. Avec le changement climatique et face à la raréfaction de la ressource, des modèles de tarifications de l’eau selon les usages sont à définir. Les niveaux d’investissements sont également à revoir. À titre indicatif, le Plan Eau prévoit 500 millions pour réhabiliter les canalisations en France, à comparer avec les 2 milliards que l’Espagne engagera dans les six prochaines années. Dans le cas de ces trois exemples, la réindustrialisation, enjeu de souveraineté, passe par un nouveau modèle d’affaires et instaurer, au sein des filières, des modèles de coopération inédits avec les donneurs d’ordre. Si les contraintes législatives et normatives constituent de réelles opportunités pour offrir des solutions industrielles à même d’accompagner les transitions, il faut aussi, soutenir la fabrication industrielle dans les territoires en tenant compte de la réalité de la concurrence. À noter que depuis le 1er janvier dernier, une nouvelle réglementation est entrée en vigueur. Il s’agit du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF ou Carbon Border Adjusment Mechanism). L’instrument réglementaire européen de tarification carbone (Taxe Carbone) s’applique à donc à toutes les matières premières et les matières usinées que l’industriel importe et qui sont taxées alors que, de manière paradoxale, un produit fini en provenance, par exemple de Chine, pourra entrer sur le marché français sans taxation. Autrement dit, un industriel européen ou français qui va importer de la matière va voir son coût de production grever contrairement à un produit manufacturé qui pourra entrer dans l’espace communautaire sans taxes douanières. Cette arme à double tranchant doit être clarifiée. Consciente du problème de la biodiversité, la filière travaille sur la décarbonation mais pas seulement. Elle réfléchit aussi à concilier dynamisme économique et protection du vivant, en apportant des solutions innovantes. C’est avec ce levier que s’opérera la réindustrialisation des territoires, sous réserve que la mise en œuvre de cette ambition soit possible. Comment ? En favorisant les fabricants français et européens, dans le cadre des plans de relance. Le contexte concurrentiel doit être pris en considération mais aussi des exigences réglementaires et législatives qui leur sont imposées.

*Créée en 2019 de la fusion du Cisma et de Profluid, Evolis a élargi son périmètre avec l’intégration du Symop en 2021.