Depuis son intervention dans les chantiers du Grand Paris Express, l’établissement public est engagé dans une politique de généralisation de la maquette numérique, avec dans le viseur un premier jumeau informatique en 2024. Petit à Petit, le building information modeling (BIM) devient la norme même dans les infrastructures. Concerné au premier chef par cette évolution, SNCF Réseau s’est lancé dans une grande campagne de déploiement de la maquette numérique. Le gestionnaire mène aujourd’hui une cinquantaine de projets qui intègrent ce support. Il a pu expérimenter toutes les configurations : conception et travaux réalisés en interne ou confiés à des tiers. « Nous voyons dans la maquette numérique un moyen de mieux communiquer, de mieux se coordonner et de gagner en qualité, explique Judicaël Dehotin-Adounvo, adjoint au directeur du programme BIM et continuité numérique. La législation s’oriente vers une obligation de cet outil. Nous souhaitons travailler avec toute la filière afin d’anticiper ce changement : les bureaux d’études, les entreprises de travaux, etc. » Entre autres opérations, l’établissement public est intervenu, en tant que maître d’ouvrage et maître d’œuvre, au niveau des interconnexions entre les voies de RER et les nouvelles lignes de métro franciliennes. Ses ingénieurs ont gagné en maturité grâce à ces cas complexes. « Les chantiers du Grand Paris Express ont servi de catalyseur à notre démarche BIM, indique Judicaël Dehotin-Adounvo. Ils nous ont poussés à partir immédiatement en BIM sur plusieurs projets et utiliser le potentiel de la maquette numérique. »

Trouver le bon compromis

L’exemple de la gare Issy RER en 2017 donne un aperçu des changements d’organisation engendrés par ce support graphique. Outre SNCF Réseau, deux autres maîtres d’ouvrages étaient impliqués : la Société du Grand Paris et SNCF Gares & Connexion. Pour administrer les différentes équipes engagées dans la conception, la mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination (OPC) incluaient des BIM managers. Les premiers pas furent compliquer. « C’est bête à dire, mais réaliser un projet en BIM entre plusieurs acteurs nécessite de se mettre d’accord et d’organiser le fonctionnement en amont », souligne le responsable. Par ailleurs, dans le cadre de sa maîtrise d’œuvre, le gestionnaire d’infrastructures a mis en place une plate-forme d’échange de documents entre les bureaux d’études. Une fois encore, de nombreuses discussions furent nécessaires pour établir des remises régulière de livrables. « L’accompagnement du changement reste un sujet critique, remarque-t-il. Nous avons mené d’autres projets depuis et il y a toujours une phase d’adoption délicate. Mais passer les deux premiers mois, les personnes engagées de ce processus s’adaptent à ces nouvelles modalités et vont même au-delà de nos demandes. »

Vers un double informatique

Cette année, l’administrateur poursuit dans cette direction avec la mise en place de plates-formes de collaboration BIM dans tout l’Hexagone. Ces systèmes contribueront à accroître le nombre d’opérations utilisant la modélisation informatique. Il compte aussi travailler avec les instances de normalisations pour parvenir à des standards communs. À plus long terme, SNCF Réseau désire créer des jumeaux numériques de l’ensemble du patrimoine sous sa responsabilité. Ces représentations afficheraient en temps réel les principales informations relatives à l'état des installations et des véhicules. Ils pourraient également être employés pour effectuer des simulations. « Une modélisation numérique complète de nos infrastructures nous donneraient la possibilité de répondre rapidement à des questions complexes : vérifier si un nouveau modèle de rame peut emprunter nos voies ou déterminer de nouvelles routes pour les trains en cas de panne électrique », analyse Judicaël Dehotin-Adounvo. La première de ces copies devrait voir le jour en 2024. Les premières normes internationales sur le BIM ferroviaire, qui devraient sortir cette année, concourront à cette dynamique. M. D.